4 astuces pour aider les eleves allophones a apprendre du vocabulaire

Les petits, les grands, les fréquents, les rares, les beaux, les nouveaux… Les mots! Ils sont essentiels au développement de la compétence langagière. Pourtant, soutenir l’acquisition du vocabulaire est un défi de taille pour plusieurs enseignants qui se retrouvent face à des élèves qui n’ont pas le français comme langue maternelle. Les locuteurs non natifs, qu’ils aient le français comme deuxième ou troisième langue, sont constamment bombardés de mots nouveaux. Et ils ne les intègrent pas de la même manière que les locuteurs natifs. Comment faire alors pour qu’un élève retienne un mot, à savoir sa forme, son sens et son usage pragmatique, qu’il lit ou entend pour la première fois?

 

1. Répéter et répéter

Les résultats d’une étude reconnue (Webb, 2007) démontrent que les locuteurs non natifs peuvent acquérir du vocabulaire en contexte de lecture autonome. En fait, plus l’élève lit souvent un mot nouveau, plus il s’améliore pour l’utiliser, que ce soit par rapport à son orthographe, à son sens, à sa forme, à l’application de ses fonctions grammaticales ou à son usage pragmatique. L’enseignant peut soutenir les lecteurs autonomes en leur demandant de faire la liste des nouveaux mots qu’ils découvrent. Par la suite, il peut réutiliser les mots nouveaux dans son enseignement ou fournir des textes qui contiennent ces mots. Toutefois, il serait réducteur de croire qu’une exposition répétée est le seul moteur d’acquisition du vocabulaire. En effet, pour que la répétition ait une valeur réelle, il faut varier le type de répétition.

 

2. Utiliser une approche multimodale

Exposer à répétition le locuteur non natif à un mot selon une approche multimodale présente de nombreux bénéfices. D’abord, lorsque le nouveau mot de vocabulaire est présenté sous divers modes (p. ex. dans un texte accompagné d’images, à l’oral avec une petite animation théâtrale ou par une vidéo), l’élève le retient plus vite et plus longtemps (Duquette, Renie, & Laurier, 1998). Sa compréhension orale est aussi facilitée puisque l’oral est soutenu par l’écrit ou le visuel, comme lorsqu’on mime le mot en le disant.

Afin d’intégrer un mot à son lexique, l’élève doit le catégoriser en l’encodant dans un système de classification de connaissances. Lorsque plus d’un mode de présentation est utilisé, le mot est codé de multiples manières (Akbulut, 2007; Nikolova, 2002; Jones & Plass, 2002). Les gains les plus notables ont justement lieu lorsque l’apprenant peut lui-même juxtaposer plusieurs modes à de nouveaux mots (Nikolova, 2002).

En classe, pour favoriser l’apprentissage multimodal, on peut par exemple demander aux élèves de préparer une chasse au trésor dans l’école et de créer une carte des lieux intégrant le nouveau vocabulaire à apprendre (mode visuel, support papier). Ils peuvent en plus parcourir le chemin avec une tablette et enregistrer leur trajet tout en expliquant à voix haute ce qu’ils voient et ce qu’ils font (modes visuel et oral, support numérique).

 

3. Enseigner les mots en relation avec d’autres

Il est aussi pertinent d’enseigner les mots non pas en les isolant, mais en les mettant en relation avec d’autres, car le lexique est une structure où chaque mot entre dans une relation de sens et de forme avec d’autres (Tremblay, 2009). Ce sens n’est pas toujours évident pour le locuteur non natif et il faut le rendre explicite. Enseigner les relations de synonymie, d’antonymie, d’ordre, d’intensité, de hiérarchie, de forme, de même que la notion de champ lexical, permet aux mots d’acquérir une valeur et une gradation dans la pensée. En décrivant des mots en réseau, on permet à l’élève de créer des liens associatifs entre les nouveaux mots et ceux qu’il connait déjà (Aitchison, 2012). La rétention des nouveaux mots (leur forme et leur sens) est également bonifiée lorsque des mots sont présentés en petits groupes, en les insérant par exemple dans une phrase ou une courte histoire (Shaffer, Doube, & Tuovinen, 2003).

Ainsi, en pratique, au lieu d’introduire une liste de nouveaux mots regroupés par thématique, comme les mots de la météo, il vaut mieux se concentrer sur les relations entre certains mots. Par exemple, lors d’une journée plus grise, on pourrait présenter les mots « pluie », « pluvieux », « parapluie », « bottes de pluie » et « imperméable » et demander aux élèves d’intégrer ces mots à une histoire animée (écriture, narration ou jeu théâtral). Ensuite, ils pourraient répéter le même exercice avec les mots du beau temps, comme « soleil », « ensoleillé » et « parasol ».

 

4. Enseigner le nouveau vocabulaire en contexte authentique

Enseigner le vocabulaire en contexte authentique permet à l’élève d’effectuer un rapprochement entre le milieu scolaire et le milieu naturel, en dehors des murs de l’école (McDonough & Shaw, 2013). Cela est particulièrement important pour les élèves qui ne parlent pas le français à la maison. Même en définissant les mots nouveaux, c’est en vivant leurs nuances que l’élève peut améliorer son vocabulaire de façon notable (Nash & Snowling, 2006). Des tâches d’enseignement authentiques permettent justement de vivre ces nuances.

Par exemple, un enfant peut apprendre que « pain » est équivalent à « bread » ou à « khabaz ». Toutefois, la notion de pain varie grandement selon le lexique personnel et familial. Il est possible que, pour un élève, « pain » ne réfère qu’au pain tranché que l’on utilise pour faire des rôties, alors que l’élève syrien, lui, ne connait peut-être que le pain sans levain (le pain pita). Aucun des deux ne s’imaginerait automatiquement le pain baguette auquel d’autres auraient pensé…

En pratique, il faut user de beaucoup de créativité et ne pas craindre les bonnes idées! Un exemple de contexte d’apprentissage authentique pourrait être d’encourager les élèves d’une classe à participer à un blogue existant. De cette façon, leur texte serait lu, ferait l’objet de réflexions et peut-être de commentaires!